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À paraître
Publié en 1890, La Bête humaine, dix-septième volume des Rougon-Macquart, relève le défi d’une écriture des limites. Comment le naturalisme fondé sur l’observation du réel aborde-t-il le monde indicible de la folie ? Comment le roman parvient-il à entrelacer trois thèmes – la vie du rail, la justice et la criminalité – sans affaiblir sa construction ? Tandis que l’attaque antinaturaliste s’amplifie après le Manifeste des Cinq contre La Terre, comment Zola répond-il à la crise du roman, imprégnée du déclinisme fin-de-siècle ?
Les désirs de « la bête humaine » ont fasciné Zola dès 1866, mais ce roman préfreudien, au-delà des drames de sang, est hanté par des questions sans réponse sur le Sexe et la Mort. Poème de la ligne, il impose un voyage au pays des symboles mortifères rehaussés jusqu’au mythe, celui de la Machine, de la Fêlure et de la Catastrophe, sans cesser d’interroger les dessous de la civilisation, lesquels dévoilent qu’il n’est pas d’humanité qui ne participe de l’inhumanité qu’elle déchaîne.
Cet essai aborde le roman le plus sombre d’Émile Zola et sans doute l’un des plus modernes, dont le titre aurait pu être : L’Inconscient. Le lecteur découvre avec le travail de l’écrivain et sa biographie, replacés dans le moment de la Belle Époque, la genèse tortueuse de La Bête humaine. Il pénètre au cœur de sa composition et de son anthropologie romanesque, découvre sa poétique de la vitesse et de l’énergie. Un bilan critique expose la réception du roman, de sa parution jusqu’à nos jours; il est accompagné d’une bibliographie sélective.
Olivier Lumbroso est professeur de littérature française à l’université Sorbonne Nouvelle, membre du DILTEC. Ses travaux de recherche portent sur Zola et les naturalismes. Il codirige le « Centre Zola » de l’Institut des textes et manuscrits modernes du CNRS.
Introduction
Partie 1 – Réseau
1. Le chemin de fer en régime naturaliste
Le roman naturaliste du rail au XIXe siècle
L’originalité de La Bête humaine
2. Le naturalisme zolien au carrefour
S’étonner et douter : deux facultés maîtresses
Le courage intellectuel
L’inconnu connu : la vision oxymorique
3. Jugements contemporains
Partie 2 – Machine
1. La ligne et le cycle
1878-1880 : l’avant-projet du roman
Médan 1878 : la « Ligne » aux premières loges
2. La fabrique du roman
La préparation du roman
La vie du rail in vivo et in vitro
L’écriture et la dynamique des forces
Partie 3 – Étau
1. Dominations
Pression et répression
Time is money
Machines de guerre
2. Soumissions
Liberté, Égalité, Fraternité
Peuple et bourgeoisie : visages de l’hostilité
Partie 4 – Chaosmos
1. Calcul, hasard et chaos
Des détails qui déraillent
Les dessous de la bourgeoisie
Défaillances du langage
Dérailler / Délirer
2. Archéologie de la folie
De l’impersonnalité à la non-personne
La folie meurtrière : connexion/déconnexion
L’expressionnisme du paysage
La folie dans tous ses états
Séverine et la quête brisée de résilience
3. Thanatographie
La bête humaine
Catastrophe et Histoire
Partie 5 – Signe
1. Lignes en abyme
Fiction de la genèse
La genèse et ses miroirs
2. Miroir argentique
Folie en chambre
Phantascopie
Conclusion
Lectures modernes du roman
Bibliographie
Index des noms propres